UNDER THE TURQUOISE SKY : un film en guise de lettre d’amour à la Mongolie

UNDER THE TURQUOISE SKY : un film en guise de lettre d’amour à la Mongolie

Si le long-métrage Under the Turquoise Sky est un film qui touche au cœur, c’est sans doute parce qu’il en émane une sincérité lumineuse qui, dès la première minute touche au cœur de spectateur, dès lors ouvert à toutes les émotions induites par l’histoire, la couleur, les paysages de ce bijou cinématographique. Non dépourvue d’une agréable teinte d’humour, cette fiction aux passage parfois loufoques sonne absolument juste et les acteurs au charisme incroyable éveillent rires et pleurs chez le spectateur. Rencontre avec le réalisateur Kentaro à l’issue de la projection.

Under The Turquoise Sky (image extraite du film de Kentaro)

Un petit-fils gâté d’un riche homme d’affaires, Takeshi, erre dans les prairies de Mongolie avec un compagnon inattendu à la demande de son grand-père.

Under The Turquoise Sky raconte l’histoire de Takeshi, jeune héritier menant une vie de dandy, envoyé par son grand-père, un important homme d’affaires, dans les steppes arides de Mongolie. Guidé par Amaraa, un voleur de chevaux mongol, le jeune homme est embarqué dans une aventure surréelle à travers les couleurs vibrantes et saturées de paysages infinis. Durant ce road trip fait de rencontres et d’expériences surprenantes, Takeshi se découvre un mode de vie inimaginable auparavant pour lui. Lorsque Amaraa est arrêté par la police, Takeshi est contraint de poursuivre seul sa route sur les traces de sa parente disparue, vers une nouvelle identité et un véritable sentiment de liberté.

Rencontre avec le réalisateur Kentaro

Alors que thème de l’étranger arrivant en terre exotique – ici la Mongolie – pour changer sa vie apparaît dans certains films comme un prétexte pour plonger un acteur dans une culture lointaine que le film doit faire découvrir au spectateur, le public se trouve ici happé du début à la fin du film par le récit, où les personnages hauts en couleur interagissent malgré leurs différences et parfois même avec peu de mots avec une émotion vraie. Durant le court échange qui a suivi la projection avec le public le 8 juillet dernier, Kentaro, simple et accessible – presque malicieux – a su transmettre l’émotion de cette véritable lettre d’amour à la Mongolie qu’il livre au spectateur.

Au micro, le réalisateur Kentaro, avec à ses côtés, l’acteur mongol Amarsaikhan Baljinnyam

Yuya et Amaraa, stars du cinéma japonais et mongol

Diplômé des beaux-arts, Kentaro a eu une carrière d’acteur qui ne l’a pas empêché de réaliser en parallèle des courts-métrages et des films documentaires. Under the Turquoise, son premier long-métrage de fiction, réunit trois stars : la jeune star du cinéma japonais Yuya Yagira, prix d’interprétation Masculine du 57ème Festival de Cannes pour Nobody Knows d’Hirokazu Kore-eda, le chorégraphe Akaji Maro internationalement connu comme danseur de Butoh, et l’ambassadeur du cinéma mongol, l’acteur Amarsaikhan Baljinnyam. Le film est une ode à la Mongolie et à ses paysages, un road movie où transparaît un immense amour de la culture nomade et des Mongols. Le micro a circulé dans la salle et Kentaro s’est prêté au jeu des questions-réponses.

« J’ai eu l’envie d’écrire une lettre d’amour à ce pays. »

Le public : Comment en êtes-vous arrivé à imaginer ce film en Mongolie,
plutôt qu’ailleurs ?

Under The Turquoise Sky (image extraite du film de Kentaro)

Kentaro : Il y a dix ans, j’ai été invité au début par des amis mongols qui m’ont fait découvrir leur pays. J’ai visité la compagne, les steppes. Ce sont des paysages qu’on ne trouve pas ailleurs. J’ai aussi pu voir des hommes d’affaires pleurer à la vue des paysages. En assistant à cela, je me suis dit que c’était quelque chose à garder, à photographier. Ça me trottait dans la tête. Puis, j’ai rencontré Amaraa, qui est aujourd’hui le plus grand acteur mongol. C’est un véritable ambassadeur culturel pour la Mongolie. J’ai eu envie de faire un film avec lui. Tout a commencé comme ça. En fait, la Mongolie fait partie de ma vie et j’ai eu l’envie d’écrire une lettre d’amour à ce pays.

Une osmose parmi les spectateurs

Le public : Question rapide sur la technique du film. Avez-vous utilisé un filtre couleur pour le tournage ?

Kentaro : Pas pendant le tournage. Nous avons longtemps travaillé avec l’étalonneur de Jean-Jacques Annaud, dont la mission a consisté à améliorer les couleurs. On a ce rendu très joli, qui rend le film encore plus onirique. Under The Turquoise Sky est un conte moderne où je joue avec les couleurs : monochrome au Japon, pour symboliser la froideur moderne de la technologie ; et en Mongolie, des couleurs saturées mais primaires.

Il circule dans la salle une sorte d’osmose, un peu comme si le public présent formait une sorte de tout harmonieux lié par les émotions offertes par le film. Un spectateur prend le micro et pose une question dont les sincérité et si déconcertante, qu’un éclat de rire général retentit dans la salle comme si cet homme avait prononcé tout haut cette réflexion qui se trouvait effectivement au cœur de chacun.

Le public : Pourquoi n’avez-vous pas fait de film avant ?!

Amarsaikhan Baljinnyam est une star en Mongolie et un ambassadeur culturel à l’étranger pour son pays.

Kentaro : J’ai essayé quand même ! (rire de Kentaro qui pratique avec plaisir l’auto-dérision) Mais vous savez, pour faire un film, c’est super compliqué. Chacun a ses envies et il faut le financement. Là, on peut dire que je suis tombé sur un bon timing. Tout a commencé avec la rencontre avec Amaraa, puis avec Yuya qui était disponible juste au bon moment. Sambuu aussi est une actrice très respectée en Mongolie. Elle est une peu comme Jeanne Moreau, tout le monde la connaît. J’ai réalisé ce défi de réaliser un film d’auteur avec des stars. Et ça, c’est un vrai cadeau.

Le public : J’ai trouvé ce film admirable, touchant de la première image, que vous osiez cette image du vieil homme avec ses ravages. De l’émotion, les paysages à couper le souffle ! Je vous dis juste toute mon admiration.

Kentaro : Je vous remercie !

Être juste, avec peu de mots. La magie du film.

Le public : Votre film est tellement vivant et pourtant il y a si peu de dialogues ! Comment avez-vous fait pour interagir entre les paysages et le dialogue ?

Kentaro : Avoir peu de dialogues était mon plan dès le début. Quand on va à la campagne en Mongolie, les gens sont très peu bavards. En France, on est très bavard, on parle beaucoup pour expliquer quelque chose. Là-bas, il y a une connexion qui se fait parfois, sans beaucoup de mots. J’aimais bien cette idée d’avoir peu de dialogues. J’ai aussi vraiment senti que la comédie, l’acting, est une langue en elle-même. Durant la tournage, j’ai pu communiquer avec les acteurs non pas avec les mots mais avec le jeu d’acteur. De nombreuses scènes ont été improvisées. C’est ce qui a fait émerger la magie dans le film.

Le public : Comment a été composée la musique du film ?

Under The Turquoise Sky (image extraite du film de Kentaro)

Kentaro : J’ai produit pas mal de cette musique à partir de morceaux de vieux morceaux de country américaine interprétés avec les instruments traditionnels mongols. J’ai dirigé les instruments. À partir de ce morceau-là, j’ai fait jouer les violonistes mongols sur l’image, comme par exemple Mandaakhai Daansuren qui a interprété le morin khuur, la vièle à tête de cheval mongol. Plus qu’un simple musicien, il est devenu l’un des acteurs du film.

Le public : Merci pour ce splendide film. Pour ma part, je suis partie en Mongolie ! Ma fille aussi a beaucoup aimé. Je ne pensais pas, mais je m’y suis retrouvée. Les paysages sont splendides. Effectivement, peu de dialogues, mais tout est dit : les rapports humains, le rapport au paysage. Pour moi, c’est comme une peinture. Vraiment splendide.

Souhaitons longue vie à ce film de Kentaro, qui nous pousse au-delà des retranchements de nos sentiments, et nous emmène vers les paysages infinis de la steppe sans pour autant nous plonger dans l’exotisme. Effaçant toutes les barrières culturelles, Under The Turquoise Sky, propose bien plus qu’un voyage : une véritable rencontre avec l’autre et un réancrage dans le présents et les émotions. 

Affiche du film de Kentaro, Under the Turquoise Sky

Fiche technique du film Under The Turquoise Sky

Réalisateur : KENTARO
Interprètes : Yuya Yagira, Amra Baljinnyam, Akaji Maro,
Tsetsgee Byambaa, Sarantuya Sambuu, Sahel Rosa, Taro Suwa, Jun Nishiyama,
Nori Sato, Ganzorig Tsetsgee, Undarmaa Tuvshintushig
Année: 2020 | Durée: 97min | Genre: Comédie-dramatique | cinémascope 5.1. VOSTFR
(mongol/japonais)
Scénario : KENTARO, Amra Baljinnyam
Image : Ivan Kovac
Etalonnage : Olivier Garcia
Musique : Lulu Gainsbourg, Oki, Altai Band, Mandaakhai Daansuren, Kenji “Jino”
Hino…
Directeur artistique : Erdenebileg Byambatsogt
Lumière : Shimpei Nakamura
Montage : Manu de Souza, Bertrand Boutillier
Costumier : TAKEO KIKUCHI
Production (France/Mongolie/Japon) : Kazz Kitaki, Uran Sainbileg, and
KENTARO

Librement rédigé par Emilie Maj
D’après le débat qui a suivi avec Kentaro
lors de la projection spéciale de son film au cinéma Le Panthéon
en partenariat avec la Librairie du Panthéon, l’Ambassade de Mongolie et Borealia
le samedi 8 juillet 2023

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